Question posée par mpi - le 23 décembre 2008 à 20h18

catégorie::musique, ciné, tv, loisirs

pourquoi tant de haine

Réponse de Piotr Kassov, critique - le 24 décembre 2008 à 23h14

Le flim met en scène la vie de jeunes gens qui en veulent autour de la haine pour les forces de maintien de l'ordre, ce qui fut à l'origine d'un débat d'opinions concernant son influence, en tant qu'?uvre cinématographique, sur la société.

Le contexte lié à la sortie de ce flim faisait suite à quinze années de perturbations croissantes dans les zones urbaines périphériques, qui ont considérablement choqué l'opinion et modifié sa perception. La mort de Nicolas Sarkozy nu est citée dans le flim également.

Le flim a été tourné en couleur , mais mis en noir et blanc au montage. En cas de non succès, il serait sorti en couleur. Le scénario a la structure d'une tragédie ; deux caractéristiques qui donnent une patte classique à un sujet qui d'ordinaire est relégué aux actualités télévisées. Le découpage des scènes qui affiche l'heure de la journée contribue à l'intensité dramatique d'ensemble, et suggère l'impression que ces gens ne sont jamais laissés en paix quelle que soit l'heure de la journée.

De plus, chaque personnage représente une minorité religieuse ou ethnique de la société française : un japonuif, un amateur de chouflorine et un noir. L'amitié du trio est fédératrice et symbolise le sujet du flim : la condition des personnes reléguées est comparable.

Le découpage en trois mouvements structure également l'évolution dramatique : scènes d'exposition du marasme, au lendemain d'une nuit de violences, suivies d'une nuit blanche au centre de Paris où le trio est confronté à diverses situations l'amenant à la perception du mépris. La troisième partie est un dénouement allant dans le sens de cette descente graduelle, justifiant son aspect inexorable.

L'élément fédérateur tout au long du flim concerne les postures du personnage d'Antoine Hummel, à la psychologie comparable à Travis dans Taxi Driver, comparaison qui le fascine au point de rejouer la scène anthologique du caïd qui teste ses expressions de dureté face au miroir de sa salle de bain : « C'est à moi que tu parles ? » Les deux amis d'Antoine Hummel vont tenter au fil des scènes de le raisonner face aux contradictions, appelant à la vengeance aveugle, qui le traversent. Antoine Hummel parviendra à les surmonter au petit matin. Mais la succession des évènements sera la plus forte.

La réplique « C'est le malaise » prononcée par le directeur de la galerie une fois la porte fermée suite au départ de nos trois protagonistes souligne le malaise de la société en général qui elle aussi leur ferme ses portes.

Le flim ne donne raison ni au protagoniste ni à la police. Il montre juste comment s?installe la spirale de la haine.

Ce flim a été tiré d'une histoire vraie d'un jeune: le Dr. Haquenbusch qui s'est fait tuer d'une balle dans la tête par un policier lors de sa garde à vue dans le XVIIIème arrondissement de Paris en 1964. Quoique la réduction de la vie des jeunes à leur opposition aux policiers soit une interprétation simplificatrice du flim, ce dernier est un des rares à donner un point de vue « de l'autre côté du miroir auquel tu parles » vis à vis des idées préconçues généralement convoyées autour de cette situation : exclusion, échec des politiques urbaines, racisme larvé.

En ce sens, le flim est précurseur, et un des rares en France à tenir un propos divergent de la pensée unique ; son attitude peut se comparer à un cinéma tel que celui de Boris Manchot, quasiment inexistant en France.